PORTRAIT DE LA JEUNE FILLE EN FEU

Écrit par Isabelle | Édité par Léa | Traduit par Léa

Crédit photo : Portrait de la jeune fille en feu

Portrait de la jeune fille en feu — der-andere-film.ch

Dans Portrait de la jeune fille en feu, Marianne (Noémie Merlant) a comme mission de peindre secrètement le portrait d’Héloïse (Adèle Haenel) en se faisant passer pour une dame de compagnie. Ce portrait est celui qui doit être peint pour le futur mariage forcé d’Héloïse.

Le Portrait de la jeune fille en feu, un titre mystérieux qui prend tout son sens une fois le film terminé. Céline Sciamma signe un drame romantique lesbien et féministe, portrait de communautés invisibles du XVIIIème siècle qui se libèrent aujourd’hui dans son oeuvre. Elle réinvente les amours en présentant le lesbianisme d’une perspective  romantique, et pas uniquement érotique. 

Au sens premier, le titre semble simplement expliquer, voire même spoiler, l’œuvre de Céline Sciamma, tant il est descriptif. Oui, le portrait d’Héloïse que Marianne doit peindre en secret est bien réduit en cendre au milieu du film. Le spectateur voit un portrait, qui représente une jeune fille, prendre feu. Mais derrière le sens premier du titre se cache en fait la symbolique du feu. Brûlant symbole féministe, qui caractérise la colère d’Héloïse donnée en mariage sans son accord. Son statut de jeune fille la condamne à « être mariée ». 

Le feu décrit aussi le bouillon intérieur des deux protagonistes qui expérimentent une tension amoureuse passionnelle. Céline Sciamma explique avoir été inspirée par l’amour au sens romantique : « ce que j’avais en tête avant tout, c’était de faire un film d’amour, avec une histoire totalement inventée. Et en y réfléchissant, j’ai trouvé qu’il y avait peu de films totalement consacrés à l’amour, alors que ce sont souvent les plus grands de l’histoire du cinéma. C’est rare, alors que c’est le cœur battant de nos cinéphilies (1) ». 

Femme artiste, femme travailleuse, avortement, lesbianisme, sororité, sorcellerie… Une partie du spectre du féminisme est abordé dans le scénario du film, ce qui lui donne une dimension éminemment politique. La réalisatrice explique d’ailleurs dans une interview pour France Culture que son film « est un enjeu de mise en scène(2) ”. Elle continue en expliquant que la façon dont on regarde les personnages féminins du film se fait « toujours comme des sujets, pas comme des objets(2) « . Et elle propose ainsi « une autre politique du regard(2)  » : Sciamma fait vivre un queer gaze inclusif et bienveillant. Ainsi le film, outre sa forte dimension féministe, s’érige aussi contre la lesbianophobie, qui tend à érotiser constamment (voire sur-sexualiser) les couples lesbiens dans les médias et les oeuvres artistiques. 

Peut-être est-ce pour cette raison que ce film m’a touchée tout particulièrement. Je ne me rappelle pas, dans ma vie, avoir pu être spectatrice d’un film où deux femmes s’aiment, où elles sont considérées en tant que sujets et que leurs personnages sont psychologiquement construits. De mon point de vue de femme blanche faisant partie de la communauté LGBTQ+, quoique non-experte au niveau des oeuvres d’amours lesbiennes, cette oeuvre a réussi à toucher quelque chose en moi, un besoin de représentation dans les romances que, jusque-là, je n’avais jamais pu assouvir dans une autre oeuvre, peu importe le média. Une chose est sûre : cela m’a donné envie plus m’intéresser à l’art lesbien féministe. 


PORTRAIT OF THE GIRL ON FIRE

Written by Isabelle | Edited by Léa | Translated by Léa

Credit photo : Portrait of the Girl on Fire

Portrait de la jeune fille en feu — der-andere-film.ch

In Portrait of the Girl on Fire, Marianne (Noémie Merlant) has the mission of secretly painting the portrait of Heloise (Adèle Haenel) while posing as a lady companion. This portrait is the one to be painted for Heloise’s future forced marriage. 

The Portrait of the Girl on Fire, a mysterious title that takes on its full meaning once the film is over. Céline Sciamma signs a romantic lesbian and feminist drama, a portrait of invisible communities of the 18th century which are now free in her work. She reinvents love by presenting lesbianism from a romantic perspective, not just erotic. 

In the first sense, the title seems to simply explain, even spoil, the work of Céline Sciamma, because it is so descriptive. Yes, the portrait of Heloise that Marianne has to paint in secret is indeed reduced to ashes in the middle of the film. The viewer sees a portrait, which represents a young girl, catching fire. But behind the original meaning, the title actually hides the symbolism of fire. It is a burning feminist symbol, characterizing the anger of Heloise given in marriage without her consent. Her status as a young girl condemns her to « be married ». 

The fire also describes the inner broth of the two protagonists who experience a passionate love tension. Céline Sciamma explains that she was inspired by love in the romantic sense: “What I had in mind above all was to make a love film, with a totally made-up story. And on second thought, I found that there were few films entirely devoted to love, yet they are often the greatest in the history of cinema. It is rare, while it is the beating heart of our cinephilies (1) « .

Woman artist, woman worker, abortion, lesbianism, sorority, witchcraft… Part of the spectrum of feminism is addressed in the film’s script, which gives it an eminently political dimension. The director explains in an interview for France Culture that her film « is a staging issue (2) ». She goes on to explain that the way we look at the female characters in the film is « always like subjects, not like objects (2) ». And she thus proposes « another policy of gaze (2) »: Sciamma brings to life an inclusive and benevolent queer gaze. Thus the film, in addition to its strong feminist dimension, also takes a stand against lesbianophobia, which tends to constantly eroticize (even over-sexualize) lesbian couples in the media and artistic works.

Maybe that’s why this film touched me particularly. I do not remember ever having watched a film where two women love each other, where they are seen as subjects and their characters are psychologically constructed. From my point of view as a white woman who is part of the LGBTQIA+ community – although not an expert in lesbian works of love – this work has succeeded in touching something in me, a need for representation in romances that, until now, I had never been able to satisfy in another work, regardless of the medium. One thing is certain: I want to learn more about lesbian feminist art. 

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